Obésité et cancer du côlon: une pandémie annoncée chez les jeunes adultes

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Les dernières statistiques confirment que le cancer colorectal frappe de plus en plus tôt et deviendra prochainement la principale cause de mortalité par cancer chez les adultes de moins de 50 ans.

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Historiquement, le cancer colorectal représentait le prototype d’un cancer à évolution lente, nécessitant plusieurs décennies pour acquérir progressivement les nombreuses mutations requises pour évoluer de la lésion initiale précancéreuse (polype) à une tumeur détectable cliniquement, généralement après 65 ans. 

Au cours des dernières années, cependant, on note une hausse sans précédent de l’incidence du cancer colorectal chez les jeunes adultes de moins de 50 ans, aux environs de 2 à 4 % par année, cette augmentation atteignant même 8 % annuellement chez les moins de 30 ans. (1)  

Puisque nos gènes n’ont évidemment pas changé en aussi peu de temps, l’apparition aussi précoce d’un cancer qui requiert normalement plusieurs décennies à se manifester implique nécessairement que des facteurs associés au mode de vie moderne accélèrent considérablement l’apparition et le développement de ces tumeurs.

  • Écoutez l’entrevue de Mario Dumont avec Christian Carrier, chef du service d’oncologie médicale du ciusss Mauricie Centre-du-Québec via

Plus tôt et plus agressif

Selon un éditorial récemment publié dans la prestigieuse revue Science, il est vraiment urgent de se pencher sur cette nouvelle tendance si on veut éviter une véritable catastrophe sanitaire au cours des prochaines années. (2) 

Comme le mentionnent les auteurs, non seulement le cancer colorectal se déclare plus tôt, mais il possède en plus un caractère plus agressif : les tumeurs précoces présentent en effet une présentation clinique distincte, avec une prédilection pour le côté gauche (la portion descendante du côlon), et les patients atteints sont souvent diagnostiqués avec une tumeur parvenue à un stade plus avancé (métastatique). 

En conséquence, même si ces patients sont jeunes et moins touchés par d’autres problèmes de santé (comorbidités) que les plus âgés, ils ne présentent pas une survie supérieure en dépit de la possibilité d’employer des traitements plus agressifs. (3)

Pour toutes ces raisons, les spécialistes anticipent que le cancer colorectal précoce pourrait devenir la principale cause de mortalité par cancer des jeunes adultes de 20-49 ans d’ici 2030. (1)

Dérèglements métaboliques

Cette situation n’est pourtant pas irréversible puisqu’il est bien démontré que plusieurs facteurs de risque associés au mode de vie moderne sont responsables de cette hausse d’incidence de cancer colorectal précoce. 

L’obésité omniprésente et les dérèglements métaboliques qui lui sont associés, un problème qui est en forte augmentation au cours des dernières décennies, jouent manifestement un rôle.  

Une grande étude réalisée auprès de 85 256 femmes a révélé que l’obésité à l’adolescence est associée à un risque nettement plus élevé de cancer colorectal précoce, dans la quarantaine. (4) 

Un impact négatif des régimes alimentaires modernes (boissons sucrées, viandes rouges et charcuteries), de la sédentarité ainsi que de divers troubles métaboliques (hypertension, hyperlipidémie, hyperglycémie, diabète sucré de type 2) a également été observé.  

Dans l’ensemble, on peut donc voir la hausse d’incidence de cancer colorectal précoce touchant les jeunes adultes de moins de 50 ans comme une autre manifestation tangible (et dramatique) des conséquences désastreuses de l’obésité qui découle des mauvaises habitudes alimentaires modernes. 

Notre laxisme individuel et sociétal face au surpoids aura des conséquences catastrophiques dans le futur, en mobilisant de façon démesurée des ressources médicales qui ne seront plus disponibles pour traiter d’autres problèmes de santé moins prévalents. 

Le soutien d’un système de santé a ses limites qui sont déjà en voie d’être dépassées et ce tsunami de surpoids n’en est qu’à ses débuts.

(1) Akimoto N et coll. Rising incidence of early-onset colorectal cancer – a call to action. Nat. Rev. Clin. Oncol. 2021; 18: 230-243.

(2) Giannakis M et Ng K. A common cancer at an uncommon age. Science 2023; 379:1088-1090.

(3) Lipsyc-Sharf M et coll. Survival in young-onset metastatic colorectal cancer: findings from Cancer and Leukemia Group B (Alliance)/SWOG 80405. J. Natl Cancer Inst. 2022; 114: 427-435.

(4) Liu PH et coll. Association of obesity with risk of early-onset colorectal cancer among women. JAMA Oncol. 2019; 5: 37-44.

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