L’exposition au froid augmente l’espérance de vie

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Une étude montre que l’exposition à des températures froides active un système spécialisé dans l’élimination d’agrégats de protéines impliquées dans le vieillissement des cellules.

On sait depuis plusieurs années qu’une diminution modérée de la température corporelle est associée à une plus grande longévité. Ceci est particulièrement frappant chez les animaux à sang froid (poïkilothermes) comme certaines espèces de poissons dont l’exposition à une basse température (15 °C) augmente de façon remarquable la longévité.  

Ce phénomène est aussi observé chez les homéothermes (animaux à sang chaud) comme les rongeurs : lorsqu’on expose des souris au froid pour diminuer leur température corporelle de 0,5 °C, leur durée de vie est prolongée, tandis qu’elle diminue si on augmente la température de 0,5 °C.  

Il est également possible qu’un léger refroidissement du corps soit bénéfique pour la santé humaine : par exemple, même si on a longtemps supposé que notre température corporelle normale est de 37 °C (avec des variations de fractions de degrés durant la journée), les données récentes suggèrent que cette température a diminué d’environ 0,03 °C par décennie depuis la révolution industrielle et se situe maintenant aux environs de 36,6 °C. 

Il a été proposé que cette baisse, qui reflète possiblement une diminution de l’inflammation chronique grâce à un meilleur traitement des infections et de l’utilisation de médicaments anti-inflammatoires, pourrait contribuer à l’augmentation de la longévité observée au cours des 150 dernières années. (1) 

Vieillissement cellulaire

Pour mieux comprendre comment le froid peut améliorer la longévité, des chercheurs allemands se sont intéressés aux agrégats de protéines qui s’accumulent à l’intérieur des cellules au cours du vieillissement.  

Ces agrégats, causés par des défauts dans la configuration tridimensionnelle des protéines qui les rendent insolubles, sont très toxiques pour la cellule et provoquent avec le temps une perte de fonction des organes touchés. (2) 

Ceci est particulièrement frappant pour des maladies neurodégénératives comme les maladies d’Alzheimer, de Huntington ou encore la sclérose latérale amyotrophique (SLA) (connue sous le nom de maladie de Lou Gehrig ou de maladie de Charcot) qui sont toutes causées par l’accumulation anormale d’amas de certaines protéines.

Puisque les cellules renferment un système enzymatique spécialisé dans l’élimination de ces agrégats (le protéasome), ils ont voulu voir si le froid activait ce protéasome et permettait d’éliminer ces agrégats pour protéger la cellule de leur toxicité.

Il semble que cela soit effectivement le cas. (3) 

Chez un modèle animal qui contient les agrégats typiques de la maladie d’Huntington ou de la SLA, l’abaissement de la température de 20 à 15 °C provoque l’activation du protéasome et une élimination complète de ces agrégats qui est corrélée avec une augmentation de la longévité. 

Un phénomène identique est observé lorsqu’on soumet des cellules humaines dérivées d’un patient souffrant de la SLA à une température de 36 °C, suggérant que le mécanisme d’élimination des protéines défectueuses pouvant être activé par le froid est très ancien et a été conservé au cours de l’évolution.

Nettoyer la cellule

La température du corps humain est maintenue constante par un système de contrôle extrêmement sophistiqué et il n’est donc évidemment pas possible d’abaisser notre température corporelle sur de longues périodes. 

Par contre, une observation intéressante de l’étude est qu’il serait possible de contourner cette limitation : les chercheurs ont en effet observé que même à température normale (37 °C), on peut stimuler l’élimination des agrégats toxiques en augmentant les niveaux d’une protéine (appelée PSME3) impliquée dans l’activation du protéasome. 

En développant des thérapies qui parviennent à recréer ce phénomène, on pourrait non seulement ralentir un processus central impliqué dans le vieillissement biologique, mais surtout permettre de nettoyer la cellule des agrégats toxiques responsables de plusieurs maladies graves, en particulier au niveau neurologique.

♦ (1) Protsiv M et coll. Decreasing human body temperature in the United States since the industrial revolution. Elife 2020: 9: e49555. 

♦ (2) Cuanalo-Contreras K et coll. Extensive accumulation of misfolded protein aggregates during natural aging and senescence. Front. Aging Neurosci. 2022 ; 14 : 1090109.

♦ (3) Lee HJ et coll. Cold temperature extends longevity and prevents disease-related protein aggregation through PA28y-induced proteasomes. Nat Aging 2023; 3: 546-566.

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